Qui ?
Nick Botton, directeur associé de l'agence AWO, une "data Rights agency" créée en 2020 (Londres, Bruxelles et Paris).
Quoi ?
Un résumé de cette étude de 272 pages, conduite par l'agence AWO pour la Commission Européenne, sur la publicité digitale, surtitré : "Vers un écosystème plus transparent, équilibré et soutenable de la publicité digitale"
Comment ?
L'étude dont l'objectif est décrit dans l'AO, est parue le 31 janvier 2023 et est disponible dans son intégralité sur ce lien.
Elle est intitulée, "vers un écosystème de la pub digitale plus transparent, équilibré et durable". Menée entre décembre 2021 et octobre 2022, par Nick Botton, Catherine Armitage, Laureline Lemoine et Louis déjeuner Castang, elle porte sur le marché de la publicité digitale, les relations entre les intermédiaires, les plateformes, les annonceurs et les publisher, son impact sur la vie privée, la société et l'environnement et ses développements actuels. Dans son thread qui résume l'étude, son auteur commente : "Nous avons découvert que ce marché a progressé incroyablement vite, sur les dix dernières années. La publicité digitale est maintenant plus importante que tous les autres médias : télé, radio, presse magazine et affichage. Les publishers européens n'ont eu que les miettes de cette croissance (voir le diagramme ci -dessous).
Google et Meta voient leurs revenus croitre de 10 à 60 % par an !
Alors que Meta et Google ont vu leurs revenus croitre selon les années de 10 % à 60 %. Google a connu une croissance assez stable autour de 20 % par an (une performance incroyable au vu des volumes). Quand à Meta, ce sont des lignes de crête, 40 % en 2012 , 60 % en 2014 et 2016, 28 % en 2020....
That said, EU publishers saw few of the spoils from this growth. While EU publishers stagnated over the last decade, platforms like Meta and Google grew 10-60% YOY every year. pic.twitter.com/1c4FREHdZU
— Nick Botton (@NickBotton) January 31, 2023
La moitié des dépenses publicitaires vont à des intermédiaires
40 à 60 % des dépenses publicitaires vont à un réseau complexe d'intermédiaires voir aussi cet article). Ce qui rend difficile la mesure de la performance. Les annonceurs ont aussi du mal à s'assurer qu'ils ne financent pas des sites malfaisants. Et les utilisateurs ont du mal à exercer leurs droits.
Les annonceurs et les Publishers croient que la donnée personnelle accroit la valeur de la publicité digitale. Pourtant, ils n'ont pas une vue complète pour comparer cette performance avec des modèles alternatifs qui utilisent moins de donnée personnelle, comme le contextuel ou la géoloc.
Il y a très peu d'études indépendantes qui évaluent les bénéfices de la publicité digitale,
Qui plus est, les études sur le ciblage présentent des résultats contradictoires : Google estime que l'impact des datas personnelles sur le revenu est + ou - 70 % alors que cette étude menée par des universitaires en 2019 parle de 4 %. En dépit de cela, les annonceurs et les agences restent accrochés au ciblage sur la base de la donnée personnelle. Les plateformes contrôlent l'accès à une proportion très significative de la data utilisée pour la publicité digitale. Les annonceurs et les agences parlent de "dépendance". Les publishers disent qu'ils perdraient des revenus sans les plateformes.
Avec les GAFAM, une relation amour haine, mais sans amour
Quand on leur demande de décrire les relations avec les plateformes, presque tous les annonceurs et publishers petits et grands emploient des termes négatifs comme : "abusive", agressive", "une relation amour haine, mais sans amour", "des relations asymétriques", "frenemies". Ces perceptions négatives peuvent être imputées au manque de transparence des plateformes sur la performance, et sur la façon d'utiliser les datas.
Ce manque de transparence rend difficile la mesure de l'efficacité, et la comparaison des différents modèles publicitaires. Et renforce la position d'acteurs qui ont une position forte sur le marché.
L'étude s'est aussi penché sur l'impact de la pub digitale sur l'environnement. Le secteur consomme beaucoup d'énergie à cause du traitement de la donnée et de l'importance de la fraude. On estime qu'une impression publicitaire pèse 1 gramme d'émission carbone. 10 % de la publicité va vers les sites click bait, et 8 à 15 % des 350 premiers sites de news sont liés à la pub.
Les utilisateurs peuvent difficilement contrôler et influencer la manière dont leur donnée personnelle est utilisée en pub. Les fonctions comme "your online choices" sur les plateformes sont difficile à comprendre et à utiliser.
AWO propose les mesures suivantes :
1 Rééquilibrer le marché
- Permettre aux annonceurs et aux publishers de s'appuyer sur une base légale d'intérêt légitime dans le contexte de leur relation avec leurs consommateurs,
- Interdire les intermédiaires publicitaire d'être des contrôleurs de data et les limiter au rôle de data processeur.
- Interdire les gatekeepers de cibler à des fins publicitaires.
L'idée est de limiter l'influence disproportionnée des plateformes sur la façon dont la donnée est utilisée et permettre mieux le respect du RGPD. Et s'assurer que les annonceurs et les publishers peuvent tirer des revenus du marché.
2 Renforcer le contrôle des individus sur leurs données
Pour augmenter le contrôle des individus sur leurs données personnelle, AWO propose la création par l'EU d'une interface unique ou les individus peuvent indiquer leurs préférences pour le traitement de la donnée et le ciblage au travers de tout l'écosystème.
Les utilisateurs pourraient créer leurs profils pour la pub et décider de quels types de pub ils veulent et de se désinscrire de système de ciblage sur une base personnelle.
Le ciblage serait encore possible mais fondé sur une approche moins intrusive qui limite le traitement des données personnelles.
3 Améliorer la transparence
- permettre à des analystes indépendants d'accéder à la data des plateformes et de publier des analyses des différents modèles publicitaires, accessible à tous.
- S'assurer du respect du RGPD et de la directive E Privacy dans un monde sans cookie. Une exigence de publier l'empreinte carbone de la publicité digitale. Un régime de certification pour les intermédiaires, avec des standards sur la privacy, l'environnement et la sécurité.
En conclusion, l'étude montre qu'il est nécessaire de réformer le marché de la publicité digitale. Le status-quo n'est pas soutenable. Non seulement pour les individus, dont les droits fondamentaux sont endommagés par le modèle fondé sur la data et le ciblage, mais aussi pour les publishers et les annonceurs qui veulent de la transparence et de la concurrence.