Qui ?
Hannah Oiknine, co-fondatrice (avec sa soeur Sarah Azan) de Babbler, start-up qui édite une plateforme de mise en relation entre les marques et les journalistes.
Quoi ?
Alors que l'accélérateur Techstars s'implante à Paris avec le Partech Shaker, les retours d'expérience d'une entrepreneuse française qui a intégré le programme en février dernier, à Austin, au Texas.
Comment ?
- Comment se déroule le programme d'accélération Techstars ?
Les trois premières semaines, c'est "mentor madness" : tous les jours, on enchaîne les sessions de 20 minutes avec des mentors. Nous en avons vu 120 au total ! A la fin des trois semaines, on analyse et classifie les avis reçus, avant de passer à la phase d'exécution, pour développer le produit. Le dernier mois est consacré à la préparation du "demo day" : le jour où l'on doit pitcher la meilleure version de notre produit, en deux minutes, devant 80 investisseurs. A la fin du programme, si on n'est pas satisfait, on peut demander à récupérer notre "equity", mais ce n'est quasiment jamais arrivé dans l'histoire de Techstars.
- Babbler n'est pas une start-up "early stage", vous avez déjà un produit et des investisseurs... Que vous ont apporté ces mentors ?
Nous avons été agréablement surpris par l'impact bénéfique de ces échanges sur notre vision. Depuis le début, nous avons créé un produit centré sur les agences et attachés de presse, nos clients. Mais en échangeant avec les mentors, on s'est rendu compte que le succès dépendait avant tout de l'adoption de notre outil par les journalistes. C'est là-dessus que nous axons maintenant toute notre attention, même si ce n'est pas évident de tout repenser dans un temps aussi réduit. Surtout, il est ressorti de toutes les discussions le fait que toutes nos décisions devaient être guidées par la data. Nous avons intégré beaucoup de nouveaux outils, pour pouvoir faire des tests et en mesurer l'impact. Avec Techstars, nous avons aussi beaucoup appris en UX.
- Techstars a un espace de travail partagé : qu'a-t-il de particulier ?
Il y a beaucoup d'échange entre toutes les start-up. Tous les lundis, par exemple, se tient le KPI meeting, où toutes les start-up font un tour d'horizon de leurs objectifs de la semaine passée, des résultats et des priorités pour la suite. Dans la culture de Techstars, il y a aussi les "Happies and Crappies", des soirées hebdomadaires où chacun doit raconter son meilleur et son pire moment de la semaine écoulée. Parfois, ce sont des choses très personnelles, mais cela créé des liens forts. Nous pouvons aussi nous appuyer sur les 7 responsables du programme Techstars à Austin, qui sont chacun spécialistes d'un sujet.
- Quelle est la force de Techstars par rapport à d'autres accélérateurs ?
Le réseau. Non seulement tous les mentors que l'on a rencontré dans la première phase – dont cinq que nous avons sélectionnés pour qu'ils continuent à nous accompagner - mais aussi les 5 000 aluminis, réunis sur la plateforme Techstars Connect. Celle-ci permet de contacter tout le monde, pour demander de l'aide, des conseils, une mise en relation. Les gens y sont extrêmement réactifs.
- Vous aviez aussi été accepté à l'accélérateur de Techstars à New York. Pourquoi ce choix d'Austin , alors que vous aviez déjà un pied à Manhattan, en y ouvrant un bureau ?
A New-York, tout coûte très cher, la qualité de vie pour les entrepreneurs est horrible. A Austin, c'est totalement différent : j'ai divisé mon loyer par trois. D'ailleurs les gens de New York ou San Francisco font le même calcul et déménagent, comme beaucoup de start-up ou de grandes entreprises de la tech. A l'issue du programme Techstars, nous allons garder nos bureaux ici, pas question de retourner à New-York.
- Médias et agences sont pourtant à New-York, pas à Austin...
Etre ici n'est pas un inconvénient pour notre développement commercial : aux Etats-Unis, tout se fait par e-mail ou par téléphone. A New-York, les gens n'ont de toute façon pas le temps : même s'ils sont dans le même quartier, ils fixent des appels de dix minutes plutôt que les rendez-vous physiques, c'est totalement différent de la France.
- Vous avez levé 2 millions d'euros en 2016 : allez-vous chercher à lever à nouveau des fonds ?
Nous avions sous-estimé le besoin de financement pour nous développer aux Etats-Unis... Ici, il existe le concept de "ponycorn", les licornes auxquelles on a coupé la corne : des start-up européennes qui ont de super produits et qui commencent à rencontrer une certaine traction aux Etats-Unis, mais finissent par abandonner car elles sont rapidement à court de fonds. Nous ne voulons pas nous retrouver dans cette situation. Avoir un VC américain au capital nous permettra aussi de faciliter notre développement ici.
Propos recueillis par Benoit Zante