Qui ?
Fayrouze Masmi-Dazi, fondatrice du cabinet Dazi Avocats.
Quoi ?
La chronique des semaines 6 et 7, pour suivre pas à pas ce que la justice américaine veut bien révéler de ce procès historique du web mondial (5° semaine ici, 4° semaine ici, 3° semaine ici, 2° semaine ici ,1° semaine là). L'avocate fera l'ouverture de la matinée Jardins ouverts jardins clos le 15 novembre, en racontant ce procès historique. Demandez-nous une place !
Comment ?
La semaine 8 commence sur des chapeaux de roues, Sundar Pichai va témoigner à partir du 30 octobre dans l'après midi. Au cours des deux dernières semaines, le département de la Justice américain a fini ses plaidoiries, la coalition des 38 Etats a présenté ses arguments et témoins et nous avons enfin pu accéder à de nombreux documents discutés au cours du procès grâce aux recours de plusieurs médias américains.
I don’t know what’s actually going on with this platform but it’s nice to know a thread on Google evidence dumped over the weekend received some visibility.
Google CEO Sundar Pichai is expected to testify this morning. https://t.co/PZ2vznLC8A
— Jason Kint (@jason_kint) October 30, 2023
Entre 2014 et 2021, le coût du paramétrage par défaut (TAC pour Traffic Acquisition Cost) a augmenté de 270%. L’accord avec Apple en représente la plus grande part
Lors de l’audition croisée de Prabhakar Raghavan, un SVP de Google chargé de Google Search, Assistant, Geo, Ads, Commerce et les Produits de paiement, il est apparu dans un slide (non accessible à votre serviteur) que le coût du paramétrage par défaut de Google comme moteur de recherche s’est élevé à 26,3 milliards de dollars en 2021. Le montant était classifié dans le form 10K sous la catégorie TAC – Traffic Acquisition Cost. Cette catégorie inclut ce que Google paie à ses partenaires distributeurs (les fournisseurs de systèmes de navigation, fabricants de mobiles et appareils et les développeurs de logiciels). Cela inclut également ce que Google paie à ses Partenaire de Réseau (Network Partners) pour les publicités diffusées sur leurs propriétés.
Joshua Hafenbrack, un conseil du DOJ (department of justice américain) a complété ces éléments par une vision historique de l’évolution de ces coûts, indiquant à la Cour qu’en 2014, Google payait 7,1 Mds$ à ces partenaires pour le paramétrage de son moteur de recherche par défaut. Une augmentation de 270% en 7 ans.
Sur ces montants, il a été enfin dévoilé que l’accord entre Apple et Google représentait 18 Mds$ en 2021, sur les 26 Mds évoqués. Au cours de ces dernières semaines, l’accord a fait l’objet de plusieurs interrogations. La question centrale est toujours de savoir quelles incitations positives ou négatives peuvent conduire à un tel accord et dans quelle mesure cet accord serait anticoncurrentiel sous le prisme du droit américain.
Les revenus du search progressent de 400 % en 8 ans.
En huit ans, les revenus publicitaires du Search ont augmenté de 400% passant de 46,8 Mds à 146,8 Mds$.
Hafenbrack a mis en perspective des TAC avec le coût des investissements en R&D (41 Mds) et avec l’évolution des revenus de Google sur la publicité dans le Search. Il indique qu’en 2021, Google a généré 146,8 Mds$ de revenus publicitaires sur le Search. En 2014, il générait « seulement » 46,8 Mds$s, soit une augmentation, en 8 ans, de 400%. L’augmentation des coûts du paramétrage par défaut semble donc corrélée à l’augmentation des revenus, mais dans une moindre proportion.
Raghavan a précisé que deux tiers des revenus et de la croissance depuis plus de dix ans proviennent de la publicité dans le Search.
Google maintient qu’il ferait face à une concurrence féroce.
Amazon cause des insomnies à Google.
Au cours de son audition croisée par ses conseils, Raghavan a indiqué que la puissance du moteur de recherche commerciale d’Amazon lui avait causé des nuits sans sommeil, captant des Mds $ d’investissements publicitaires annuellement. Il a ensuite détaillé combien la concurrence de Meta ou de TikTok était importante sur la donnée transactionnelle. Google consacre beaucoup de temps et d’étude à ceux qu’elle considère comme ses concurrents analysant certains documents datant de 2019 sur un projet intitulé « Project Charlotte » portant sur Amazon.
La privacy, une perte de temps pour Google
En 2019, Google aurait subi une attaque de la part de son concurrent DuckDuckGo sur son faible niveau de protection des données personnelles. Interrogé à ce sujet, Raghavan a dû s’exprimer sur un échange de mail interne dans lequel Cory Ondrejka VP et Tech advisor du CEO de Google souhaitait savoir s’il fallait répondre à l’attaque et si cette dernière était fondée. A cela, Raghavan a répondu qu’il y avait « certainement quelque chose à explorer sur le terrain de la privacy des recherches. Mais les équipes ont bien plus de choses à faire que de perdre leur précieux temps ». Il « souhaitait savoir s’il y avait des preuves d’un impact sur Google attribuable à ce facteur ».
Une analyse interne de Google relative à des données collectées sur la période du premier trimestre 2020 semble montrer que Google avait des scores de performance faibles sur les « Top Drivers » de la confiance des utilisateurs de Google Search aux USA, Royaume-Uni, Allemagne et Australie. Ces « drivers » incluent le fait de respecter la vie privée des utilisateurs et préserver la sécurité des données personnelles. Raghavan a précisé que jusqu’en 2019, Google collectait la donnée historique du Search sur une période indéfinie. La même année, Google aurait envisagé de proposer une option plus protectrice qui anonymisait les données utilisateurs, mais n’a jamais adopté la proposition, d’après le témoignage de Raghavan. Techniquement, inclure un bouton de switch qui permettait de stopper la collecte par Google aurait été possible mais « cela ne permettait pas un bon design de produit » selon le même témoignage.
La semaine 8 commence sur des chapeaux de roues, Sundar Pichai va témoigner à partir d’aujourd’hui, lundi 30 octobre 2023.