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Comment Dentsu Aegis Network s’est préparé au RGPD

Qui ?
Karine Lucas, Chief Data Officer de Dentsu Aegis Network et Directrice Générale iProspect Data Consulting.

Quoi ?
"Agence média ou agence data?", l'une des "questions qui fâchent" évoquée lors du 5 à 7 du digital organisé par Petit Web et Oath le 5 avril 2018.

Comment ?

"Chez Dentsu Aegis Network en France, nous sommes 1 300. Tout le monde manipule de la donnée, c'est un peu stressant [dans le contexte d'entrée en vigueur du RGPD, ndr]" explique Karine Lucas. Mais ce défi du RGPD, ou GDPR en anglais, est aussi, à l'écouter, une opportunité pour les acteurs de la donnée et de la publicité : "c'est une bonne chose : le RGPD va apporter plus de confiance sur le marché. Il va y avoir un échange. Si on collecte de la donnée, il faudra apporter un service et de la valeur pour le consommateur en contrepartie."

Pour former ses 1 300 collaborateurs, le groupe Dentsu Aegis Network a privilégié l'e-learning, avec une formation conçue sur mesure, aboutissant à la certification de 100% des salariés. Mais la tâche ne s'arrête pas là : "au-delà de comprendre le RGPD, il faut surtout l'appliquer au quotidien." Le groupe s'est ainsi doté de Chief Data Officers et de Data Protection Officers au niveau mondial et dans ses différentes filiales. Les différents partenaires (prestataires technologiques, régies...) ont été interrogés sur leurs pratiques.

"Le rôle du 'data champion' est notamment de faire appliquer la législation. Pour que ça fonctionne, il faut que la démarche vienne d'en haut : nous avons eu l'appui de la direction pour motiver les gens, en leur montrant que ce n'était pas un n-ième sujet à traiter. Pour l'instant, je suis plus optimiste qu'au début quand j'ai commencé à travailler sur le sujet..." Ça tombe bien : Karine Lucas va maintenant pouvoir anticiper le sujet suivant, celui de la directive e-Privacy, en discussion actuellement à Bruxelles. "Il faut imaginer comment on travaillera demain si on ne collecte plus de cookies", ce qui pourrait arriver si la version la plus stricte du texte est adoptée.

Heureusement, le métier de Chief Data Officer ne se limite pas à anticiper les évolutions réglementaires. "Il consiste avant tout à réinventer nos outils d'agence. Aujourd'hui, quand on fait du média planning ou des stratégies médias, on s'appuie encore sur des outils comme les panels. Ils existeront toujours, ils sont toujours pertinents et indispensables pour les médias classiques. Mais sur le digital, on a besoin d'aller plus loin, avec une dimension temps réel qui n'existe pas sur les panels. Est-ce que nous devons avoir notre propre data ? Est-ce qu'on doit se doter d'un 'datalake' d'agence, avec des données propriétaires mises à disposition de nos clients ? Ce sont des questions qu'on se pose actuellement."

Ces préoccupations autour des données, cristallisées par l'entrée en vigueur du RGPD, sont révélatrices du mouvement opéré par les agences médias pour élargir leur champ d'activité : "nous sommes maintenant un cabinet de conseil pour accompagner les annonceurs sur leurs sujets data" explique Karine Lucas. "Une des premières attentes des annonceurs et des entreprises par rapport à la donnée, c'est la connaissance client, avant le média. La data, c'est aussi optimiser les performances CRM, les taux de conversion sur site : c'est du digital au sens large, pas que du média."

En parallèle, la Chief Data Officer note une maturité croissante des annonceurs sur tous ces sujets. "C'est un mouvement naturel, les outils comme les DMP et les datalakes appartiennent au client, ils sont avant tout 'first party', ils nécessitent des équipes dédiées. La maturité des clients croit très très vite. Ce qui est surprenant, car quand on est annonceur, on n'a pas que le sujet de la donnée à traiter. Pour moi qui fais de la data à longueur de journée, c'est déjà beaucoup de travail pour me tenir à niveau... Les annonceurs y consacrent de plus en plus de temps."

Le sujet va d'ailleurs bien au-delà du média digital : "en télévision, en affichage, on n'achète pas de la donnée en tant que telle, mais on va en utiliser. La data, c'est de la connaissance client. Quand on sait que tel segment de ma DMP ou de mon datalake est plus affinitaire avec tel type de musique ou telle émission télé, ça permet aussi de mieux investir en télé, en ciblant mieux ses investissements offline." Bref, la data, "ce n'est plus une option, ça devient le métier du directeur marketing ou du chef de projet marketing : chacun doit comprendre le RGPD et maîtriser la donnée" conclut Karine Lucas.

Benoit Zante

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