Qui ?
Pascal Vegh, Directeur Associé Digital CRM eCommerce France chez Coca-Cola European Partners (CCEP).
Quoi ?
Un point sur la transformation digitale en cours au sein de l’embouteilleur de Coca-Cola en France.
Comment ?
Pour vendre ses sodas en France, Coca-Cola s'appuie sur une organisation assez unique, répartie entre deux entités : Coca-Cola Company France, en charge de la stratégie des marques, et Coca-Cola European Partners France (CCEP), en charge de la commercialisation des produits auprès d'un vaste réseau de distributeurs, en Grandes et Moyennes Surfaces (GMS) et en Consommation Hors Domicile (CHD). Comme toute les entreprises, CCEP, qui compte 2 600 salariés et 5 usines en France, se trouve impactée progressivement par le développement du digital et les changements de comportement des consommateurs. "Le digital est une opportunité pour nous de nous réinventer, aussi bien au niveau des RH que du commercial ou du marketing" explique Pascal Vegh, qui a plus particulièrement en charge les aspects marketing de la transformation en cours.
En deux ans, CCEP a ainsi doublé ses investissements dans le marketing digital, notamment pour suivre la croissance du "digital commerce", qui recouvre les drive, la livraison à domicile (Amazon, mais aussi Leclerc Chez Moi, Carrefour livré chez vous,...) et les agrégateurs comme Uber Eats ou Just Eat, par exemple. "Kantar estime qu'en 2025, la part de marché du drive aura doublé. Nous sommes déjà numéro 1 en part de marché en valeur sur les boissons sans alcool, nous voulons continuer à accompagner nos revendeurs pour qu'ils aient le bon mix produit, le bon marketing et les bons outils."
Le second axe d'investissement est le "digital shopper marketing", pour générer du trafic et des ventes dans les réseaux de distribution. "En France, 8 foyers sur 10 consomment nos marques. Nous cherchons maintenant à mettre en place des campagnes marketing plus ciblées, avec du CRM, des plans de couponing, du drive-to-store, afin de couvrir tout le parcours d'achat." Illustration de cette nouvelle approche : pour le lancement de la boisson Fuze Tea, CCEP a mené une campagne ciblant les cafés-restaurants partenaires à travers la France, avec des messages géo-localisés diffusés aux heures de repas.
En parallèle, CCEP a décidé de se constituer une expertise dans le domaine de la donnée, en renforçant ses actions de collecte et en mettant en place une Data Management Platform (DMP), opérée par la start-up française mediarithmics avec le soutien du cabinet de conseil Velvet Consulting. Tout au long de l'année, jeux concours et opérations promotionnelles s'enchaînent, sur tous les canaux de distribution : ils sont agrégés sur le site Instants Plaisir. En l’espace de quelques jours 20 000 consommateurs ont par exemple demandé à recevoir une box Fanta. "Nous nous sommes lancés sur le sujet il y a un an, ce qui a un avantage : nous avons pu dès le début commencer à anticiper l’arrivée du GDPR."
L'exploitation de ces données au sein de la DMP est destinée à créer du trafic chez les revendeurs, personnaliser nos contenus, collecter des "insights" ou mieux mesurer l'impact des actions marketing. "La force de Coca-Cola est d'avoir beaucoup de contenus pour chacune de ses marques. Notre rôle est d'utiliser ces contenus de la façon la plus pertinente possible, en les utilisant de manière plus relationnelle et moins publicitaire." L'intérêt de la DMP est aussi de pouvoir se connecter avec d'autres fournisseurs de données, dont les distributeurs qui commencent à constituer des offres dédiées, à l'image de RelevanC chez Casino ou Foodlab chez Carrefour. "Nous avons défini un vaste plan de 'trigger marketing' à l'année avec nos partenaires, définissant plus de 1 000 messages différents, En un an, nous avons généré 60 millions de contacts."
"Entre le moment où nous avons choisi notre partenaire DMP et la mise en marche de l'outil, il n'y a eu que quatre mois : tout a été très vite. Beaucoup d'éditeurs nous proposaient des DMP média, alors que nous voulions une DMP CRM, capable d'agréger des données online et offline. Mediarithmics a été le seul à proposer un tel outil, Full Stack, qui soit aussi capable d'opérer et de personnaliser nos campagnes." Pour sa part, Coca-Cola Company, a opté pour une DMP Média (lire notre article à ce sujet) : "Nous allons maintenant chercher à nous rapprocher de leur outil afin de mieux collaborer ensemble."
Cette transformation du marketing n'est pas seulement un enjeu technique. CCEP a initié un vaste programme d'acculturation, les Digital Fridays, avec des interventions mensuelles d'experts (Google, TF1 ou Uber…) ainsi que des entrepreneurs, à destination de toute l'entreprise. Pour les formations plus pratiques, une "Digital academy" a été créée, avec une dizaine de modules sur des sujets pointus tels que l'achat média programmatique ou le design thinking. "Nous n’arriverons à mener cette évolution que si tout le monde est à l'aise avec le digital" estime Pascal Vegh.
Benoit Zante