Qui ?
Xavier Niel, Pdg du groupe Free, Roxanne Varza, Dg de Station F et Jean de la Rochebrochard, de Kima Ventures.
Quoi ?
Une heure de "dialogue" soigneusement filtré sur Club House, le poulpe était bien sage parmi les 1 000 participants.
Comment?
Ca faisait quinze jours que Clubhouse, le nouveau réseau social vocal (que Twitter vient d'imiter avec Spaces) bruissait de la présence de Xavier Niel dans de nombreux salons. Le grand patron constate : "Aujourd'hui, CH est encore pas mal axé développement personnel". Et passe à l'action, le 22 février dernier à 13 h, devant un public de 1 000 personnes. Le titre : "ask me anything", allèche. Mais le patron de Free ne tient pas la promesse. C'était plutôt "ah que je ris de me voir si beau en ce miroir", un exercice de développement personnel pour l'image publique de Xavier. En effet, sur les 60 questions de l'assistance nombreuse, seuls 5 privilégiés ont été choisis, pour des séances de brosse à reluire, et on n'aura rien appris sur la nouvelle école agricole ou l'activité de Free. La première partie, où le patron était interrogé par Roxanne Varza, mais tacle Jean de la Rochebrochard sur ses deals ratés, s'est avérée (relativement) plus intéressante.
Qui le patron de Free admire-t-il ? "Des inventeurs fous, comme Jean Bertin, l'inventeur de l'aéro train (visible encore près d'Orléans, NDLR) dont le bébé à été condamné par la SNCF." Quels sont ses ratés ? "Le deal Moderna, en 2019" . Son anti-portfolio ? -"Google. En 2000, ils cherchaient à racheter la licence Free avec l'idée de lever une dizaine de millions de dollars". Mais aussi Uber, "on n'a pas investi dans les premiers tours, en 2011 2012". Ou Alan "Nous avions la possibilité d'entrer au premier tour, mais ils ne voulaient pas être dilués, et cherchaient des fonds propres pour obtenir une licence. A l'époque, on ne savait pas faire. Mais depuis, on s'est rattrapés". Très actif sur Club House, où il participe au dialogue, lui, Jean de la Rochebrochard investit dans deux start up par semaine, avec Kima Ventures, principalement dans le BtoC et les réseaux sociaux. Le patron de Free, très cool, insiste pourtant sur les occasions manquées de son dirigeant.
Mars 2020 : Xavier Niel investit au creux de la vague
Comment s'est passée l'année 2020 ? "Nous avons suivi un raisonnement très simple : si le Covid dure, ce qui se passe au travers d'un réseau va exploser. Nous nous sommes dits que c'était le moment d'investir très fort, en mars et avril, le mois où les gens étaient un peu sidérés. Mars a été le mois le plus favorable, parce que plus personne n'osait investir. Les investisseurs avaient peur. Nous avons remis beaucoup d'argent dans une boite américaine dirigée par des Français. (lecteur chéri, peux-tu nous dire laquelle, NDLR ?) Aujourd'hui, elle est valorisée 85 milliards de dollars, nous avons fait X10,5 en huit mois !".
-La parole aux questions. Malheureusement, le choix des intervieweurs s'est révélé décevant. Il y avait 60 questions, seuls six personnes ont été appelées à monter sur scène. Le journaliste Hugo Clément a poussé son avantage, en soulignant l'investissement de Xavier Niel dans la cause animale qu'il soutient (aux côtés de Grandjeon de Ventes privées et Simoncini d'Angell). Pour Xavier Niel : "Le pouvoir politique a peu de pouvoir, la société civile doit se mobiliser pour faire bouger les choses". Fort bien.
Station F perd 7 M€ par an, mais aide le système...
Le patron du Slip Français, Guillaume Gibault, interroge le patron de Free en même temps qu'il marche dans la rue. La Caserne, l'inititative de la Mairie de Paris consacrée à la mode durable, doit-elle chercher des financements de grands groupes de la mode ? "Pas la peine d'essayer de faire venir les grands du secteur, il faut faire bouger les lignes avec les start up comme vous. J'ai toujours peur des gros corporate qui veulent aller chercher des trucs dans les petites boites. " selon Xavier Niel (ce qui ne manque pas de sel venant du compagnon à la ville de Delphine Arnaud, de LVMH). Et "faire financer le lieu par des gens dont le métier est de financer".
Xavier Niel rappelle que Station F perd de 7 à 8 M€ par an "mais ça aide le système". De fait, Station F participe fortement au rayonnement des start up françaises. Mais dans l'assistance, personne n'est appelé pour lui rappeler que le programme immobilier autour de Station F doit, largement, compenser les pertes...
Le Patron de la tech française poursuit : globalement les start up doivent raisonner avec moins l'idée de lever de l'argent que de faire des revenus . "Google n'avait levé que 35 M€ avant d'entrer en Bourse, et Alan génère des recettes". Décidément, Xavier aime beaucoup Alan, cité deux fois en une heure...
-Lara Khanafer est fondatrice de Lara.ai, hébergée chez Station F et remercie le "parrain" Xavier Niel pour ce lieu. Elle interroge Xavier Niel sur la place des femmes dans la tech. XN a choisi Roxane Varza "parce que c'était la meilleure" et une dirigeant de l'école 42 (80 % de garçons), pour résoudre les problèmes de sexisme de l'école (on se souvient d'un épisode sexuel impliquant un dirigeant filmé en direct sur le site de l'école, NDLR). "Quand on a des lieux dirigés par des femmes ou des personnes issues de la diversité, ça attire des gens qui leur ressemblent". De son côté, Jean de la Rochebrochard s'est associé a Pia dIirribarne dans le fonds New Wave.
- Cedric Giorgi, Pdg de la start up de data médicale Kaduceo, interroge Xavier Niel sur ses projets dans l'écosystème tech : "Vous êtes dans l'éducation, le financement et l'accompagnement. Et maintenant ?" -"Maintenant, nous allons développer ce qui existe". Station F ne couvre pas tout le spectre, 42 va ouvrir plus d'écoles (avec un droit de licence de 1 M€, comme l'a révélé notre indiscret, NDLR). "Il y a une vingtaine d'écoles ouvertes, on en ouvre une autre vingtaine cette année". Station F va s'agrandir. Kima Ventures est dans le seed (financement des projets à l'origine), avec des tickets de 500 000 € à 2 M€ ."Kima est part d'un modèle statistique. J'avais repéré Jean à cause d'un twit qu'il avait posté, se demandant s'il y avait un modèle à investir dans 100 % des start up. Nous avons démarré en investissant 150 000 € dans 100 start up par an." New Wave va plus loin.
-Franck David Cohen , le co-dirigeant de Klassroom, se plaint de la lenteur de l'Education Nationale qui prend son temps pour acheter son système d'appel virtuel :"Nous devons faire beaucoup de lobbbying. comment faire pour qu'être Français ne soit pas un boulet?". Il est remis à sa place : "Je n'ai pas le sentiment que ce soit particulièrement dur en France. Si c'était facile, il y aurait beaucoup plus concurrents. En France on est payé par le chômage pour créer sa start up. L'entreprenariat n'est pas une promenade de santé. Amazon a gagné en force. C'est parce que le système français des télécoms était difficile à pénétrer que nous avons maintenant des entreprises à l'international".
Dans ce climat, on appréciera le contraste avec la dernière intervention d'une sénatrice : "Vous avez une vision chrétienne de l'entrepreneuriat où c'est difficile et on souffre. Mais, quand un tiers des sénateurs ne savent pas faire marcher leur étélphone portable, comment mieux aider ?". Et là, on est allés déjeuner...