Qui ?
Pierre Reboul, fondateur de l’EBG.
Quoi ?
Une tribune sur les raisons qui l'ont poussé à maintenir Benchmark Amsterdam.
Comment ?
Comme chacun sait, le business des organisateurs de salons et de conférences est particulièrement impacté par la présence du Coronavirus. Ereintées par les travel bans, les décisions de certains sponsors de se retirer des grands évènements et, tout simplement, par la peur ambiante, la plupart des grandes réunions qui devaient se tenir à la rentrée ont purement et simplement été annulées : Monaco One2one, Digital Marketing Biarritz et tout récemment Paris Retail Week. Alors, bien entendu, la question est régulièrement posée aux équipes de l’EBG : vous allez annuler Benchmark Amsterdam ? Sans d’ailleurs qu’on sache s’il s’agit d’une question ou d’une injonction. Nous avons parfois même l’impression que certains aimeraient que l’évènement soit annulé, simplement parce qu’une annulation semblerait logique, elle ferait partie d’un mouvement général, un peu comme en juin 1940. Point besoin de se battre, la guerre est perdue.
Je n’ai pas la prétention de me prendre pour le Général de Gaulle, mais la réponse est non : Benchmark Amsterdam n’est pas annulé, il se tiendra bien dans la capitale néerlandaise du 28 au 30 septembre prochain. Pourquoi ? Parce que nous avons décidé de vivre. Vivre, ce n’est pas s’enfermer, se replier sur soi, c’est affronter la réalité. D’autant que cette réalité est enveloppée par des protections nombreuses et redondantes, comme on dit dans l’aéronautique : masques pour tout le monde, voyage en train (Thalys), gel hydroalcoolique, sens de circulation, doublement des espaces par rapport au nombre de participants, vacance d’un siège sur deux etc etc…
Vous êtes peut-être curieux de savoir ce que signifie organiser un évènement international dans cette ambiance ? Et bien, je vais vous le raconter. D’abord, il faut sans cesse rassurer les partenaires, dont certains – heureusement pas tous – donnent parfois l’impression de vouloir que la Terre s’arrête. On suspend tout et, dans quelques années peut être, nous reviendrons au business. C’est un drôle d’état d’esprit quand on sait que leurs concurrents profitent précisément de la situation pour ramasser tout ce qu’ils peuvent. Dans un marché partiellement déserté, le darwinisme digital est à l’œuvre et le réveil pourrait être difficile. Le rôle de l’EBG consiste précisément à convaincre ses partenaires que le marché ne s’est pas arrêté, il est simplement moins visible, mais la compétition est toujours aussi vive.
Ensuite, il faut rassurer les annonceurs, ce qui est complexe parce qu’un bon tiers d’entre eux est bloqué par un travel ban, c’est-à-dire une interdiction générale de se rendre à des évènements professionnels. Il en reste les deux tiers, qui peuvent venir, mais qui doivent sans cesse être confortés. Et c’est un travail individuel, c’est-à-dire que toute mon équipe appelle et rappelle les dirigeants des marques pour s’assurer que tout va bien et qu’ils seront présents à Amsterdam.
L’EBG peut procéder ainsi, parce que nous sommes une organisation professionnelle, nous connaissons nos adhérents. Un organisateur de salons ne peut pas appeler tous les participants des années précédentes, parce qu’il ne les connait pas et, plus encore, parce qu’eux ne le connaissent pas.
C’est aussi une tendance générale de l’évènementiel. Depuis une bonne dizaine d’années, les grands salons sont à la peine. L’heure est aux one2one, aux parcours personnalisés, aux relations entretenues à l’année, tout ce qui a, jusqu’à présent, réussi à l’EBG et au Petit Web. Le virus ne signifie pas la mort des grands évènements, il signifie une certaine fin du gigantisme et de l’anonymat.
Alors voilà. Organiser un évènement international dans cette ambiance, c’est épuisant, c’est peu rentable, mais c’est la vie. Parce que ce virus est un être vivant et qu’il est là pour longtemps. Il faut donc apprendre à vivre avec lui, tout en le gardant à distance, et c’est ce que nous faisons. Et nous allons récidiver parce que, le 12 novembre prochain, se tiendra Digital Innovation. Avec les mêmes précautions, avec la même pression, avec la même volonté de continuer, sans céder de terrain à une certaine complaisance qui dit que si tout s’arrêtait, ce ne serait pas si mal.
Pierre Reboul