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Danone et Renault en route vers un nouveau CRM

Qui ?
Yan Claeyssen, directeur général de Publicis ETO, Héléna Cibla, CRM et Ecommerce marketing manager de Danone France,  Nathalie Poncel, Digital data specialist et Grégory Lecointe, directeur commercial de Publicis ETO.

Quoi ? 
Le compte-rendu du Petit Club au Partech Shaker : "Shaker le CRM, de la segmentation à la personnalisation" du 15 novembre 2017, organisé en partenariat avec Amazon Advertising, Mondadori Publicité, Publicis ETO, Synthesio et TNP Consultants.

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Comment ?

Le CRM [Customer Relationship Management] est-il mort, comme l'annonce Jean-Marc Huleux, président de Fullsix dans une tribune ? "Non, au contraire, affirme Yan Claeyssen. Il a même gagné la bataille en s'imposant comme modèle de connaissance et de ciblage". Le CRM n'est plus réservé aux entreprises qui ont des liens directs avec leurs clients. Il trouve désormais des applications chez toutes les marques et toutes les entreprises, sur tous les canaux.

Le "mass media" est devenu moins efficace, l'image d'une marque se construit aussi à travers ce que les gens en disent, d'où l'importance de soigner la relation client, et d'appliquer la méthode à tous ses publics, des prospects aux ambassadeurs de marque. "Le digital et la data sont les deux faces d'une même pièce. Tout comme la marque, la data est un actif de l’entreprise. C'est un levier pour magnifier les expériences de marque, les personnaliser sur l’ensemble du parcours client et dépasser le concept publicitaire suranné" résume Yan Claeyssen.

 

Personnaliser l'expérience des membres du programme DanOn 

Danone a profité de la refonte de son programme relationnel "Danone et vous" en 2015, rebaptisé "DanOn" (lire notre article à ce sujet) pour développer une relation de proximité avec ses consommateurs, grâce à une offre de services et de contenus qui répondent à leurs attentes, notamment avec des recettes. En collaboration avec Publicis ETO, le groupe a conçu une plateforme pour unifier et consolider les données des 1,3 millions de membres actifs, pour ensuite les activer en leur envoyant des messages pertinents au bon moment, sur leur canal de prédilection.

"En tant qu'industriel, nous ne maîtrisons pas les points de vente. Nous avons commencé la première année par notre couche CRM, puis nous avons enrichi la plateforme en branchant une DMP [Data Management Platform], ce qui a nécessité encore 6 à 8 mois de travail" explique Héléna Cibla, CRM et ecommerce marketing manager de Danone France.

La démarche est itérative, Danone ne souhaitant surtout pas se "sur-équiper" avec des outils superflus. D'une logique classique de segmentation "RFM" (récence, fréquence d'achat et montant des achats), le groupe a l'ambition d'évoluer vers du marketing prédictif. Les premières pierres sont posés, avec un premier cas d'usage stratégique :  l'anticipation du "churn", la désinscription d'un membre. "En identifiant le moment où un de membres est le plus susceptible de nous quitter, on peut mettre en place une stratégie "de la dernière chance" pour le rattraper. Il faut être très précis sur le contenu, et il faut qu'il voit le mail, au bon moment."

Pour atteindre ce niveau de prédiction et de précision, la marque tire partie des données dont elle dispose sur ses membres. "Notre premier souci est de soigner l'inscription, en allant chercher les personnes qui auront de la valeur pour nous dans nos campagnes médias". Pour maximiser le taux d'inscription, les formulaires sont à l'état de l'art des pratiques UX. Les landings pages sont personnalisées et affichent le bénéfice qui parle le plus au prospect : coupons, recettes de cuisine, contenus "food" ou un discours générique lorsque Danone n'a pas assez d'informations en amont pour établir un profil. La plateforme permet aussi de personnaliser tout le "welcome process", c'est à dire le parcours d'inscriptions au cours duquel la personne complète son profil. 

Une fois le membres inscrit au programme, la fréquence de sollicitations est ajusté, en fonction de la réactivité et de l'engagement de l'individu vis à vis de la marque. "Même lorsqu'on parle à quelqu'un de très engagé, on ne dépasse pas 8 sollicitations par mois". Danone suit de près le taux de désabonnement pour rester en dessous du taux moyen sur le marché : 0,25%.

L'animation du programme repose sur des contenus de marques et des recettes, envoyées par e-mail sous forme d'un fil 100% personnalisé. L'annonce d'événements "food" sont ponctuellement relayés aux membres, selon leur lieu d'habitation. Elles fonctionnent bien pour susciter l'intérêt des membres, mais le support roi reste le coupon. "Il a un coût mais c'est aussi une source de revenus pour nous."

Aussi, Danone n'a pas abandonné son magazine papier envoyé 4 fois par an par courrier. "Notre base de données a été initiée il y a 20 ans. Une grande partie de notre base active et qualifiée n'a pas de coordonnées e-mail. La stratégie de digitalisation prend du temps et nous voulons continuer de toucher ces personnes, elles ont de la valeur pour nous."

Le magazine est aussi envoyé aux membres "online pour des expositions croisées offline/online. "Elles sont très complémentaires. Nous dégageons encore plus de valeur des consommateurs 'mixtes', précise Héléna Cibla. La personnalisation est un levier pour améliorer la rentabilité, soit en générant plus de revenus, soit en optimisant les coûts en amont". Les coupons sont personnalisés en fonction des habitudes des clients. Ainsi, dans une logique de bienvenue, un coupon sur un produit peut être de 0,75 centimes, alors qu'il sera de 2 euros dans une logique de réactivation. La rentabilité du programme est mesurée avec Kantar.

Prochaine étape pour DanOn, l'amélioration de la dimension relationnelle. "On doit se mettre dans une posture d'interaction avec les gens pour entrer dans une relation vraiment personnelle."

Passer à la publicité personnalisée pour Renault 

Chez Renault, l'approche CRM couplée à de la publicité ciblée a réduit drastiquement le coût du lead sur la zone "Europe G9"(Europe hors France). "La communication mass market sur le produit, c'est fini. Nous accompagnons 23 pays, avec des niveaux de maturité digitale différents. Notre stratégie digitale est donc très différente dans chaque pays."

Cette nouvelle approche a été notamment lancée via un outil de personnalisation de bannière, la DCO (pour "dynamic content optimisation"), mis en place par l'équipe digitale de Renault G9.  Les résultats sont déjà très positifs, l’engagement et l’attribution  à la marque sont en progression et le taux de clic a augmenté en moyenne de 20%, par rapport à une campagne similaire n'utilisant pas de DCO.

Call to actions, photos, modèles de voiture, messages, les créas sont personnalisées, et l'outil permet aussi de valider les visuels directement dans l'outil. Un gain important pour l'organisation où tout se passait avant par échange de mails.

Pour aller plus loin dans la définition des audiences, l’équipe digitale Europe G9 a travaillé avec Publicis ETO sur un modèle prédictif de la conversion des prospects/clients en fonction de son comportement digital. Il fait le pont entre l'identification des prospects et leurs comportements digitaux. "La marque en Europe n'est pas dans tous les pays aussi forte et installée qu'en France, raconte Nathalie Poncel. Nous avons donc décidé de nous concentrer sur les prospects qui ont un engagement vis à vis de Renault, et d'identifier où ils en sont dans leur cycle d'achat : s'ils sont dans une phase d'intérêt pour la marque, on a une fenêtre de tir de 2 à 3 mois pour convertir."

La méthode de "prédiction" est simple : un niveau de "chaleur" est attribué au prospect en fonction du temps passé par page, par exemple la visite de la page "configuration du véhicule" ou de la page financement, et l'information est poussée dans la DMP. "On optimise l’achat de mots-clés pour re-cibler les prospects chauds. S'ils reviennent, nous personnalisons le site web pour les inciter à faire un test-drive", résume Nathalie Poncel.  Pour mesurer l'impact sur la suite du parcours, Renault prévoit de connecter son arbre de décision à son outil de management de leads début 2018.

"Renault a pris la main sur la data. Et la collaboration avec ses agences a complètement changé", analyse Grégory Lecointe. "Aujourd'hui, l'entreprise travaille d'abord sur la donnée puis interagit en direct avec les agences, mais aussi avec Facebook et Google, qui sont des fournisseurs d'insights importants. Le concept créatif est 360° dès le départ,  lié aux contenus et à la cible." Internalisée depuis un an, l'équipe digitale est passée de une à quatre personnes (un directeur, un profil data, un profil contenu et un profil CRM et E Business).

La forte croissance du marché s'accompagne d'un niveau de maturité digitale disparate d'un pays à l'autre. "Le coût de déploiement d'une telle plateforme est important mais maitrisé pays par pays. On investit beaucoup dans la transformation digitale, mais on surveille le ratio choix techno / maturité. “Les pays les moins avancés n'ont pas de DMP. L'équipe digitale les aide à piloter leurs activations locales et à mettre en place des outils correspondants à leur niveau de développement.

Le nouveau CRM est avant tout un chantier de transformation digitale : il faut supprimer le fonctionnement en silo et les barrières "Il est très important d'avoir un top management qui appuie les décisions. Il faut être en méthode agile." conclut Nathalie Poncel.

Monelle Barthélemy 

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