Qui ?
Joseph Trojman, directeur stratégie, études et Datamining au sein de la branche de Banque de détail de la Société Générale.
Quoi ?
Un point sur la stratégie Big Data de la Société Générale, à l'occasion de la conférence DataJob.
Comment ?
"L'agilité existe aussi dans nos grosses organisation, surtout sur les problématiques de data" entend prouver Joseph Trojman. Avec les volumes de données à leur disposition, les grands groupes ont en effet un avantage concurrentiel sur les plus petites entreprises : c'était aussi la conviction de Vaughan Chandler, qui a contribué à transformer Qantas Airlines grâce à la data (lire notre article). A la tête d'un département de 45 personnes (statisticiens, dataminers, ingénieurs innovation, économistes, chargés d'étude marketing,..), Joseph Trojman a pour tâche d'exploiter les informations de la banque pour lui faire prendre un train d'avance. Les 10 ans d'historique de ses 8 millions de clients ont été ainsi analysés pour en tirer des enseignements destinés à nourrir le marketing stratégique, la connaissance client et l'innovation.
"Aujourd'hui le client - et même le consommateur de façon générale, pas simplement vis-à-vis de la banque - essaye de reprendre le contrôle sur la relation commerciale : il veut avoir son mot à dire. Pour notre secteur, cela se traduit par un décollage de la multi-financiarisation [plusieurs banques pour un même client] et une attente de personnalisation." C'est le premier défi de la Société Générale : réduire le taux de "churn", c'est à dire le nombre de clôtures de compte, historiquement faible, mais en croissance en raison de ces nouveaux comportements. Plutôt que de considérer ses clients en fonction de leur seule "valeur", la Société Générale s'intéresse désormais aussi aux comportements, en modélisant leurs actions. "Quand on croise les comportements des clients avec les valeurs, on tombe très souvent sur des surprises. C'est clairement une rupture pour les établissements bancaires."
"Nous ne voulons pas utiliser de la data pour la vendre ou la qualifier, mais vraiment pour faire notre métier et répondre à notre client là ou il nous attend." Une démarche qui se rapproche de celle d'Orange, notamment. L'opérateur se demande comment utiliser ses data pour améliorer l'offre, la qualité du réseau ou l'efficacité de ses magasins (lire notre article) Pour des raisons légales, l'analyse des comportements se fait toujours de façon anonymisée et agrégée, et non à l'échelle individuelle. Ces informations sont utilisées pour personnaliser les offres et la relation, et optimiser les modes de contact.
Historiquement, l'agence et le téléphone représentaient la quasi-totalité de la relation client. Avec le web et le mobile, les fréquences et les points de contact se sont multipliés : autant de données à analyser et à exploiter. Pour mieux comprendre ces évolutions, la représentation des différents parcours de ses clients sur tous les canaux permet d'optimiser le rebond commercial ou d'ajuster les canaux utilisés. "Cela nous a obligé à faire appel à des connaissances qui existent dans nos organisations mais sont diffuses, non organisées. L'un des challenges, c'est de ré-articuler le marketing, l'analytic et une dimension IT. C'est un enjeu qui est suivi au plus haut niveau, à la direction générale, qui favorise ce type d'approche." Reste à trouver les bons talents, des profils qui comprennent les problématiques marketing, les méthodes quantitatives et statistiques, tout en maîtrisant les algorithmes et l'IT... Le nouveau mouton à cinq pattes du marketing client.
Benoit Zante