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Rafi Haladjian : « Mother n’est pas un objet cool de plus »

Qui ?
Rafi Haladjian, Pdg de Sen.se.

Quoi ?
Une interview du pionnier des objets connectés, qui sort Mother, primé au CES et privé de Crédit Impots Recherche !

Comment ?

Comment fonctionne Mother ? 

On veut que l’utilisateur puisse continuer à vivre normalement : c’est cette volonté qui a guidé la conception de notre produit. La pièce centrale, la « Mother », récupère les données transmises par des « Motion Cookies », de petits galets fins dotés d’un processeur, d’un accéléromètre et d’un thermomètre qui peuvent être fixés à presque n’importe quoi pour répondre à vos préoccupations du moment. Vous souhaitez dormir mieux ? Posez un Motion Cookie sous votre matelas pour suivre votre rythme de sommeil. Vous voulez surveiller votre hydratation ? Accrocher un Motion Cookie à votre bouteille d’eau et le tour est joué. Les résultats de l’activité, des conseils et des alertes sont ensuite disponibles sur le mobile, tablette ou ordinateurs de l’utilisateur.

Comment Mother se démarque de la famille des objets connectés  ?

Nous n’avons pas essayé de fabriquer un objet cool de plus, notre enjeu était de créer pour le grand public un environnement avec 30 à 40 objets communicants et pas simplement deux ou trois. Fondamentalement, le défi  n’est pas de repérer un usage précis pour fabriquer un objet ad-hoc mais de concevoir un environnement flexible où chaque usage peut trouver une place. Il ne nous paraît pas concevable de payer des centaines d’euros par objet, c’est pourquoi il faut proposer un objet qui s’adapte à plusieurs usages. Les Motions Cookies peuvent se reconfigurer en fonction de ce que l’utilisateur veut faire ou savoir, ils s’intègrent de manière gracieuse dans la vie de tous les jours et ne nécessitent pas de rechargements incessants. Surtout, ils sont assez intelligents pour ne pas vous embêter toute la journée. Les Motions Cookies ont un processus d’apprentissage et n’envoient que des alertes pertinentes.

 Dix applications sont disponibles avec le pack initial, et après ?

Nous offrons un pack de départ pour que les premiers utilisateurs de Mother puissent avoir un choix varié. mais nous mêmes, nos partenaires et des développeurs tiers développeront d’autres applications. Via l’application Mother, l’utilisateur aura accès à un appstore et pourra faire de plus en plus de choses avec le même appareil. Ces applications seront gratuites car on considère que certaines choses doivent être gratuites quand elles ne nécessitent pas de coûts extérieurs. On cherche à bâtir un écosystème de grande qualité, les applications devront être extrêmement léchées et bien faites pour leur mise en ligne. Si vous proposez, comme Philips, une ampoule électrique qui s’allume avec votre smartphone, cela s’appelle une télécommande et je ne pense pas que les télécommandes vont changer le monde. Nous voulons faire des objets connectés intelligents.

Et les marques là-dedans ?

Les objets connectés ne doivent pas être vus comme une famille d’objets à part. Les marques doivent faire attention à ne pas se tromper de métier. Pour donner un exemple, si votre métier est de fabriquer des chapeaux, vous n’allez produire des appareils pour chapeaux mais bien des chapeaux communicants ! Ce sont les services que les marques doivent inventer, pas des objets nouveaux. Nous sommes en contact avec des grandes marques, dans l’agroalimentaire, le luxe ou l’industrie. Elles nous disent "on a fait du web, on a fait des applications mobiles, on a fait du social, maintenant c’est les objets connectés. On veut en faire". Mais la marche à franchir pour faire des objets connectés est bien plus élevée. Malgré la profondeur de leurs poches et leur envie d’y aller, les marques sont souvent refroidies par les impératifs du marché : 18 mois de production, un volume minimum de plusieurs milliers d'unités, un réseau de distribution… Le métier du hardware est très différent du métier du numérique, notamment parce qu’il ne suffit pas de se connecter à Internet pour accéder à un produit. Nous leur proposons plutôt de concevoir des services qui s’intègrent sur des capteurs génériques. Il est plus facile de partir d’un capteur qui existe et de construire le service autour. On peut se lancer en quelques semaines.

Quels conseils donneriez-vous à un entrepreneur souhaitant se lancer sur le marché des objets connectés ?

Ne pas y aller si on n’a pas deux millions d’euros ! Pour une application ou site web, avec un peu de talent il est possible de démarrer dans son garage, pour sortir quelque chose de génial. Mais pour les objets connectés, les coûts sont énormes. Même en étant un génie de l’électronique, du designer aux conteneurs sur les bateaux, je ne vois pas comment se lancer dans cette aventure sans 2 millions d’euros devant soi !

Propos recueillis par Basile Michardière

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