Qui ?
Laurent Laforest, DG de Bic Shave Club, Sonia Bataille, Directrice de clientèle chez Re-Mind PHD et Pierre Guilianelli, Project Manager de l'agence Hungry & Foolish.
Quoi ?
Un bilan de la campagne menée par la nouvelle marque du groupe Bic pour se faire connaître, en misant uniquement sur le web.
Comment ?
Bic Shave Club est un service d'abonnement lancé par Bic au printemps 2017, en France, et depuis en Grand-Bretagne. Le concept est directement repris de Dollar Shave Club, une start-up américaine qui s'est retrouvée sur le devant de la scène grâce à son acquisition par Unilever, en 2016, pour le montant record d'un milliard de dollars. Le service du groupe Français repose sur une offre d'essai à 2€ (4€ auparavant), puis des envois mensuels ou bimestriels, à partir de 5€.
Laurent Laforest explique sa problématique : "Bic a une notoriété extrêmement forte en France, mais ce concept d'abonnement est très nouveau : il faut l'expliquer aux consommateurs. De plus, la notoriété de la marque Bic est associée à de nombreux produits... sur le rasage, on l'associe avant tout au jetable, pas à un système rechargeable". Pour faire connaître le service, les équipes de Bic avaient d'abord misé sur une stratégie ultra-ciblée d'acquisition, en s'adressant à des "niches". "Au lancement, nous avons essayé de cibler des thématiques un peu étroites, mais sans trop de succès. On s'est vite rendu compte que nous avions des abonnés dans toutes les classes d'âge : nous sommes une marque grand public, et nous avons fait évolué l'offre en conséquence."
La leçon a été retenue : pour sa campagne d'automne 2017, Bic Shave Club a donc privilégié une approche "mass-média", 100% vidéo, en cherchant à reproduire sur le web les mécaniques médias de la télévision, avec une vague de trois semaines. La première semaine était consacrée à générer la plus grande "couverture sur cible" possible, avant de développer la répétition, grâce à des dispositifs de re-ciblage. (ou retargeting).
Pour cela, l'annonceur et son agence ont privilégié les solutions de catch-up des grands médias, aux côtés de Facebook, Youtube et Oath (Yahoo, AOL et MSN). Les écosystèmes programmatiques ont suivi, pour la répétition. "Nous aurions rêvé de faire de la télévision, mais nous devions maîtriser nos coûts d'acquisition... Avec le digital, nous avons pu reproduire un dispositif de type TV, alliant puissance et répétition, mais avec des budgets un peu plus faibles" estime le DG de Bic Shave Club.
Au-delà de la puissance du dispositif, la qualité des emplacements a aussi été particulièrement observée. "Nous voulions couvrir notre cible, certes, mais avec une durée conforme à ce que la télévision est capable de produire." Les données fournies par les éditeurs ont été confirmées par Mediametrie et son outil Nielsen Digital Ad Ratings (ex-Nielsen OCR). "Il est important d'avoir des chiffres audités et des mesures tierces, pour être certain que notre apprentissage s'appuie sur des données fiables." Une possibilité offerte par la plupart des éditeurs, à l'exception notable de Facebook, qui autorise certes des audits tiers, mais seulement à partir des données qu'il fournit lui-même : un état de fait remis en cause par de plus en plus d'annonceurs (lire aussi notre article à ce sujet ici).
Ce plan média 100% digital a aussi permis de tester différentes versions du film publicitaire, conçu spécifiquement pour le web par l'agence Hungry & Foolish : chacune des vidéos de 20 secondes mettait en avant un avantage du service, avec humour : l'économie réalisée, la qualité du produit et le concept de l’abonnement, tout en intégrant des "call-to-action". Le message principal, "Pour les hommes qui ne sont pas des moutons" avait pour objectif de faire prendre conscience aux hommes qu’ils payent trop cher leurs lames de rasoirs. "Nous avons fait attention à mettre la marque en avant très tôt dans chaque film, pour favoriser l'attribution. A la fin, les call-to-action incitaient à agir, en cliquant pour visiter le site" détaille Laurent Laforest, qui a accordé une attention toute particulière à la création, indispensable à la réussite du plan média.
"Nous avons été plutôt surpris par les résultats : en 3 semaines, nous avons touché 5 millions d'hommes, soit 40% de notre cible des 35-50 ans." La campagne s'est aussi traduite par une multiplication par 8,5 des requêtes Google sur la période et un trafic multiplié par 6 sur le site. Des dimensions plus qualitatives étaient aussi mesurées, comme l'évolution de la mémorisation, de l'intérêt pour la marque ou de la considération (+11%). "Et bien sûr, cela s'est traduit par un boost de nos abonnements, avec une amélioration de notre taux de transformation. La campagne n'a pas attiré une audience de curieux ou de promophiles."
Plus généralement, depuis le lancement du service, ses performances vont au-delà des attentes initiales du groupe : "Nous sommes très satisfaits du taux de fidélité à 90 jours : il est légèrement supérieur à ce que nous avions anticipé dans notre business plan. Surtout, nous observons un taux de satisfaction très élevé de la part de nos clients, de 88%."
Benoit Zante