Qui ?
Rodolphe Roux, VP marketing digital du groupe Seb.
Quoi ?
Une interview-bilan de la folle semaine de Seb sur les réseaux sociaux, après deux photos Instagram d'Oprah Winfrey (ici et là) relayées sur Twitter, où la star compte plus de 16 millions de followers. Derrière ce buzz (salué par Arnaud Montebourg, entre autres), c'est une consécration pour Seb, qui a entamé sa digitalisation il y a deux ans.
Combien ?
1,3 milliard de contacts (cumul mondial des audiences des plateformes online qui ont relayé et parlé du tweet d’Oprah Winfrey).
Plus de 1 600 publications autour d'Actifry en 48h.
3 millions de followers Twitter exposés.
Près de 4% de gain en bourse en une journée, après un premier article paru dans le Parisien le 15 février.
Comment ?
Oprah affirme qu'elle n'a pas été payée pour ses deux tweets, est-ce vraiment le cas ?
- Nous proposons nos produits à des leaders d'opinion, qui en parlent s'ils les aiment. Nous avons donc offert des Actifry à toute l'équipe d'Oprah. Je pense que cela a joué dans sa réaction. Son tweet a généré 500 millions de contacts en quelques heures, nous avons battu TippEx en une journée.Et après dix jours, nous avons recensé 1,3 milliards de contacts, avec des articles dans le Huffington post US, par exemple. Cette histoire a pu générer de l'inquiétude chez certains. Il est difficile d'imaginer qu'un simple tweet ait pu avoir autant d'impact.
Les Canadiens ont embrayé rapidement en proposant de retwitter le tweet d'Oprah, pour gagner des Actifry. Ne fallait-il pas mieux laisser le buzz se propager de manière spontanée ?
- Il faut gérer les excès du net dans le calme et la sérénité. En tant que Français, j'aurais tendance à penser comme vous. Mais ce n'est pas forcément la même chose en Amérique où il est difficile d'émerger avec 1 million de dollars. Aujourd'hui, notre fonction est de faire durer le buzz d'Oprah le plus longtemps possible.
En un mois, vous avez vécu successivement une gestion de crise avec le Foodle et une opportunité inattendue avec Oprah Winfrey. Comment êtes-vous passés de l'un à l'autre ?
- Pour favoriser l'émergence du digital culinaire, nous avons eu l'idée de faire un peu les fiches cuisine du Elle, mais en version numérique. Pour ce faire, Seb a racheté en juin 2011 Key Ingredients, une start-up américaine. Le but était de collecter les recettes émanant de partout. Mais dans la mise en oeuvre, le groupe aurait du prendre davantage de précautions sur le droit à l'image et les droits d'auteur. Du coup, certains ont pu imaginer que nous pillions leurs recettes. Pour faire face à la crise, nous avons rencontré une vingtaine de personnes : les directeurs généraux de médias comme Marmiton et Cuisine AZ, l'Atelier des chefs, des blogueurs comme Anne Lataillade, Mamina, Carole d'Alter Gusto ou Marie-Laure de Rose&Cook. Nous leur avons expliqué ce que nous voulons construire et nous avons fait un compte rendu de cette réunion sur la page Facebook de Foodle. Une nouvelle version va sortir dans deux mois. Nous avons eu dans cette histoire la même posture que pour Oprah Winfrey, une posture de dialogue et d'empathie. L'intérêt du digital est d'ailleurs d'exprimer la cohérence de l'entreprise.
En quoi le digital a-t-il transformé le Groupe Seb ces dernières années ?
- Un travail de fond de digitalisation du groupe a été entamé il y a deux ans, sous l'impulsion du DGA, Bertrand Neuschwander. C'est une posture d'ensemble faite d'empathie et de mise en valeur de produits innovants. J'ai eu la chance d'aborder le digital par la sociologie, quand je dirigeais l'agence regenR sur la cible jeune. Cela m'a aidé à bâtir la stratégie de ce groupe international à partir de zéro (aujourd'hui, le digital corporate emploie 10 personnes). Il s'agissait d'assumer le leadership que le groupe a dans le petit électroménager, sur le terrain du digital. Nous avons intégré la e-réputation, la gestion de contenus (nous gérons en direct les boites de production) et l'IT. Mais dans le même temps, nous travaillons avec 10 agences dans le monde, dont Buzzman, Marcel ou Marsatwork en France.
Comment s'articule la stratégie du groupe sur le digital ?
Elle est bâtie sur 5 piliers :
1/ Le contenu, il s'agit de raconter de belles histoires.
2/ La médiatisation, autour du display et de la performance. Cela prend du temps, car il faut aborder les médias marché par marché. En Turquie, le site Tefal compte 1,2 millions de visiteurs uniques le mois du ramadan. En Corée du Sud, Rowenta en compte 500 000 et Tefal, 600 000. Pour vous donner un ordre de comparaison, il y a trois ans, Mc Do avait 300 000 visiteurs uniques par mois sur son site en France. Au total, le groupe a 30 millions de visiteurs uniques par ans sur les 180 sites de ses 23 marques dans 83 pays.
3/ Le e-business. le groupe démarre dans la vente en ligne, avec 100 millions de dollars de CA dans ce secteur. Aux Etats-Unis, nous vendons des casseroles haut de gamme en ligne, alors qu'en Europe, c'est au travers de partenariat avec de grands chefs. Home and Cook en Corée du Sud, Autriche et Grande-Bretagne est une première initiative de vente directe. Le Tefal Shop turc ouvre dans quelques semaines. L'enjeu est de préparer les conditions pour être prêt pour le e-Business. Ce qui ne va pas en contradiction avec nos accords avec les distributeurs, puisqu'on peut héberger le site et redonner des clients aux distributeurs traditionnels.
4/ La e-réputation. Depuis six mois nous surveillons notre réputation avec l'outil Brandwatch. Nous surveillons les marques et avons des actions en direction des influenceurs. Nous les faisons venir dans notre univers. Nous sommes l'une des sociétés les plus actives dans ce domaine.
5/ Le numérique : il s'agit de faire émerger des initiatives digitales pour accompagner les produits d'aujourd'hui et de demain. On ne peut pas avoir raison tout seul. Il faut planter des graines dans toutes les organisations en entretenant des contacts directs avec les personnes clés du groupe.