Qui ?
Emmanuel Durand (en photo), VP marketing, Warner Bros, Zysla Belliat, présidente de l'IREP, Raphaël Pivert, Directeur des études Business Intelligence, GroupM Interaction, Estelle Duval, Directrice de Médiamétrie/NetRatings, Hélène Chartier, DG du SRI et Armand Morgenzstern.
Quoi ?
"Le GRP Digital est-il une (bonne) idée ?", une conférence organisée par Petit Web avec le SRI, chez M6.
Comment ?
"Avec le digital, on a envie de tout mesurer. Mais est-ce utile ? Est-ce facile ? Et surtout, comment intégrer tout cela dans une stratégie plus globale ?" explique Hélène Chartier en introduction. En vidéo, les annonceurs interrogés par Petit Web (lire notre article) illustrent la variété des réponses apportées, en fonction des secteurs et des problématiques business.
Zysla Belliat fournit une première piste vers une mesure commune : "Il suffit d'avoir en tête la notion de contact. Le GRP, c'est du contact, et très clairement, on peut appliquer cette notion au digital. Sans contact, pas d'efficacité." Mesurer les contacts est donc la première étape, "c'est le minimum syndical. Pour aller un cran plus loin, il faut prendre en compte la mémorisation, avec des betas propres à chaque média."
Aux Etats-Unis, l'initiative 3MS menée avec l'IAB, 4AS et l'ANA a permis de poser la question du contact internet. "Le chantier a débuté en 2011 et il n'a pas encore abouti" explique Raphaël Pivert, qui invite à regarder de près ce qui se passe de l'autre coté de l'Atlantique, car cela arrivera prochainement chez nous. Une première norme a déjà été défrichée : un contact internet est comptabilisé lorsque 50% de la surface du format est visible et qu'il est affiché au moins une seconde. L'ARF a montré qu'il fallait une demi-seconde pour que l'esprit identifie une image. "Cette notion d'impression visible va remplacer l'impression servie. C'est la nouvelle monnaie." Le plus difficile reste d'appliquer cette norme dans le monde réel, ce qui se heurte à des contraintes techniques. En 2012, à cause des superpositions d'iframes, on ne pouvait comptabiliser que 25% des impressions. Après 2 ans d'implémentation, 80% des formats US sont aujourd'hui mesurables.
Estelle Duval confirme : "Il n'y a pas d'efficacité sans exposition." Mais il s'agit désormais d'aller plus loin, pour passer de la mesure d'audience à celle de l'efficacité. Pour cela, Médiamétrie mesure les 3R : le Reach, la Résonance et la Réaction, en rapprochant les panels internet des panels consommateurs, par exemple. "Nous avons monté cinq réunions de travail avec l'interprofession pour réfléchir à cette notion de contact. Le sujet est toujours en discussion. Mais aujourd'hui, on sait que nous avons la capacité de mesurer et calculer les GRP en digital, reste à en définir les modalités." LES GRP, au pluriel, car il est délicat de mesurer de la même manière la vidéo online et le display. Dans ce domaine, l'institut a testé trois types de GRP, avec les acteurs français Alenty, Adledge et Adloox et teste actuellement OCR (Online Campaign Ratings) qui sera lancé officiellement en janvier 2014. Cette offre de monitoring de campagnes repose sur trois sources de données : un tag Nielsen, les informations socio-démographiques de Facebook et le panel d'audience Médiamétrie/Netratings. Pourquoi Facebook ? "c'était la source la plus pertinente pour les données 'sexe et âge'. Mais aux Etats Unis, Nielsen utilise Experian comme autre fournisseur de data."
Coté annonceur, Emmanuel Durand s'avoue sceptique sur la notion de GRP internet : "il donne aux annonceurs une impression de contrôle : c'est comme le cheval vapeur lors de l'arrivée de l'automobile. C'est un indicateur qui a vécu et n'est pas suffisant." En cause : la non-prise en considération de l'engagement et des critères comportementaux. "Pour nous, cantonner notre mesure d'efficacité sur internet uniquement à notre présence publicitaire n'est pas suffisant. Le GRP sur les médias traditionnels c'est du socio-démo, alors que sur internet, c'est le comportemental qui importe. Internet est le média de l'engagement. Quand le public regarde une bande annonce ou clique sur une pub, ce n'est pas que de la publicité. Il faut évidemment réfléchir en termes de couverture et de répétition, mais en même temps prendre en compte la notion d'engagement." C'est tout le sens du programme de fidélité MyWarner mis en place depuis un an : il permet la collecte d'informations sur les fans, via Facebook, Twitter ou Google+, qui sont associées aux données des sites du groupe et à des données de partages connues, via des prestataires comme RadiumOne. "Cela nous permet d'introduire des notions d'engagement et de définir des règles et un parcours idéal, une sorte de chemin de l'engagement. C'est complexe techniquement, mais c'est tout à fait à notre portée. Nous ne sommes plus du tout dans un niveau d'exigence qui serait de l'ordre du GRP." A noter : dans ces nouveaux chemins de mesure de l'efficacité, les annonceurs font oeuvre de pionnier : "Nous construisons nos outils nous même pour mesurer ces nouveaux indicateurs."
Quid de la répétition et donc du capping, l'autre variable clé du GRP ? "De nombreuses études très précises existent sur le sujet, le marché a tendance à oublier ce qui a été fait par le passé" répond Armand Morgensztern, l'inventeur du Beta de mémorisation, invité par sa fille Zysla à cette conférence. "Plus un message est fort et puissant, plus il marque les esprits et moins il doit être répété. On ne peut répondre par un nombre de répétitions unique : il faut aussi prendre en compte l'intervalle de temps entre les expositions et la durée de la campagne. Pour la presse par exemple, il faut atteindre au moins trois contacts. Au delà de sept, on arrive à saturation." Cette première conférence a posé les termes du GRP à l'heure du digital. D'autres viendront probablement, qui entreront dans les détails des différents GRP du digital et de la manière dont ils dialogueront avec les autres GRP des médias "classiques".
Benoit Zante