Qui ?
Tim Cook, patron d'Apple, qui derrière les annonces des nouveaux iPhones et de l'iWatch, vient de donner un grand coup d'accélérateur au paiement mobile, selon Pierre Métivier, Délégué Général du Forum des services mobiles sans contact.
Quoi ?
Ce que l'annonce d'Apple dans le paiement va changer, y compris en dehors de l'écosystème iPhone, en 4 points clés.
Comment ?
1/ L'annonce d'Apple Pay impose enfin la norme NFC
Après un démarrage plus que poussif du NFC, Apple a finalement décidé d'utiliser cette technologie plutôt que de développer son propre système de paiement. "Même si l'application s'appelle Apple Pay, il s'agit bien de NFC, comme indiqué dans les slides de la keynote" précise Pierre Métivier. "Finalement, peu importe si la technologie est invisible : ce qui compte, c'est que les utilisateurs d'iPhone puissent payer avec leurs téléphones avec le NFC. C'est une très bonne chose : cette technologie existe depuis une dizaine d'année, beaucoup d'industriels y croient et font en sorte de le développer dans le paiement, les transports, la billetterie..." Ne manquait qu'un acteur, Apple, pour que cette norme soit acceptée partout. "L'iPhone ne pèse que 20% en parts de marché dans le monde, mais la marque Apple a un très fort impact : ce choix va donner beaucoup plus de visibilité au NFC. Et désormais, tous les smartphones et tous les OS intègrent le NFC."
2/ Les opérateurs télécoms se retrouvent exclus du paiement mobile.
En embrassant la technologie NFC, Tim Cook reconnait qu'il n'est pas possible de transformer le paiement de l'extérieur. A la différence de Paypal, d'Amazon, de Google ou de Square, Apple pense qu'il est nécessaire de s'appuyer sur les acteurs (banques et établissements de cartes bancaires) et les infrastructures existantes (les terminaux de paiements déjà en place chez les commerçants). Mais à la différence des autres acteurs du NFC, Apple a décidé de ne pas s'appuyer sur les opérateurs téléphoniques, dont la carte SIM peut faire office d'élément de sécurité. Dans l'iPhone 6, l'élément de sécurité est directement intégré au téléphone... permettant de supprimer au passage un intermédiaire. Pourtant, les opérateurs ont l'avantage d'être directement en contact avec les clients. "En cas de souci, qui allez-vous pouvoir appeler ? Visa, Apple, votre banque ?" se demande Pierre Métivier. "Au moins, quand l'opérateur sécurise le paiement avec sa SIM, vous savez vers qui vous retourner."
3/ Apple fait de la sécurité et de la confidentialité des données son axe de différenciation.
Pour sécuriser son système, Apple s'appuie sur la biométrie, une vraie nouveauté. La reconnaissance des empreintes digitales avec Touch ID, à la place du code secret, permet d'accélérer les paiements tous en les sécurisant davantage. Mais surtout, Tim Cook l'a annoncé très clairement : Apple n'aura pas accès aux informations relatives aux transactions bancaires. Un modèle à l'opposé de celui privilégié par Google ou des pure-players comme Square, qui font du paiement mobile un outil pour capter des données, en contrepartie de commissions plus faibles que les acteurs bancaires traditionnels. Pour se rémunérer, Apple a donc passé des partenariats avec les trois grands groupes de cartes bancaires (Visa, MasterCard et American Express) et une dizaine de banques américaines, parmi lesquelles Citigroup, Bank of America, JPMorgan Chase ou Wells Fargo, qui reverseront un pourcentage sur les transactions opérées via Apple Pay (plusieurs sources l'évaluent à 0,2%). Tout le monde serait gagnant, car en contrepartie, Apple promet de réduire le taux de fraude, qui représente 0,145% des montants payés par carte aux Etats-Unis.
4/ Beaucoup de questions restent en suspens avant une arrivée en France.
L'Apple Pay sera disponible en octobre, et uniquement aux Etats-Unis. "Pour la France, il reste beaucoup de détails techniques qu'on ne connait pas encore" estime Pierre Métivier. Apple a annoncé des partenariats avec Macy's, Whole Foods ou McDonald's : pour quoi faire ? A priori, il s'agit d'adapter les terminaux de paiement. De tels partenariats ne sont pas nécessaires en France, où les commerçants sont désormais équipés de terminaux de paiement NFC, mais ce n'est pas le cas partout aux Etats-Unis. Autre question : le taux de commission d'Apple. En France, les commissions prélevées par les opérateurs de paiement sont autrement plus faibles qu'aux Etats-Unis : 0,28%, contre 2%. Quant à la fraude, elle n'excède pas 0,045% expliquent Les Echos, en raison de la généralisation de la carte à puce. Pour Apple, l'équation économique semble donc difficile à résoudre en dehors des Etats-Unis, mais tout l'écosystème NFC devrait en profiter.
Benoit Zante